Au Pays-Bas, on récompense les automobilistes vertueux

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C’est bien connu, les radars de contrôle routier fonctionnent selon une méthode très simple : la punition. Si vous roulez plus vite que la vitesse autorisée, vous recevez une amende allant de quelques dizaines d’euros à plusieurs centaines d’euros, voire même un retrait de permis si vous allez vraiment mais vraiment trop vite.

Je ne sais pas vous, mais moi je n’aime pas trop les punitions ! Pourtant, en Belgique, le nombre de PV pour excès de vitesse augmente chaque année. En dix ans, ils ont augmenté de 50%, passant de 2,3 millions à 3,4 millions (soit plus de 9000 contraventions par jour !). On peut bien entendu imaginer une série d’explications plus ou moins rationnelles : les gens sont-ils de plus en plus masochistes ? Ont-ils trop d’argent à dépenser ? Le nombre de radars a-t-il augmenté ? Les voitures sont-elles devenues trop rassurantes ? Les limitations sont-elles inadaptées ? Mais la vraie question est de savoir si, du coup, la répression est vraiment efficace.

Alternative positive aux Pays-Bas

Pour découvrir une alternative à la répression, direction Helmond, une ville de 90000 habitants située à une quinzaine de kilomètres de Eindhoven. Une heure et demie de route depuis Liège, deux heures au départ de Bruxelles, deux heures et demie si vous partez de Charleroi.

« L’étude des comportements humains est importante dans de nombreux domaines, nous confie Sander Hermsen, comportementaliste hollandais, spécialisé dans le design urbain. Vous savez, nous n’avons qu’une seule planète, mais nos comportements utilisent l’équivalent de 5 planètes en termes de gaz, de pétrole, de bois et d’autres ressources. On a donc une belle marge de progression dans ce domaine. »

Parmi les nombreux projets de recherche menés par Sander Hermsen, il y en a un qui s’intéresse à un comportement humain bien particulier : notre tendance, de toute évidence ancrée dans nos gènes, à ne pas respecter les limitations de vitesse ! « Pour obtenir un changement positif, il faut que les gens veuillent vraiment ces changements, explique le scientifique. Il faut donc élaborer des stratégies positives pour contrer les résistances, stimuler la motivation et développer les capacités des gens. »

Un succès immédiat

D’où l’idée de développer un radar qui récompenserait les automobilistes qui respectent les limitations, au lieu de punir ceux qui roulent trop vite. Mais arrêtez tout de suite de rêver : l’idée n’est pas de rémunérer les automobilistes vertueux ! L’idée, c’est qu’à chaque fois qu’un automobiliste est flashé en-dessous de la vitesse maximale autorisée, la commune verse une certaine somme d’argent à des projets utiles à la collectivité.

Par exemple, à Helmond, le bourgmestre avait mis à disposition 500 euros pour la rénovation d’une plaine de jeux bordant une rue limitée à 30 km/h. Et à chaque fois qu’une voiture était flashée en-dessous de cette limite, le système prélevait automatiquement 10 centimes et les mettait dans la tirelire de la plaine de jeux.

Résultat ? L’expérimentation du système à Helmond devait durer 2 semaines… mais au bout d’une semaine la somme de 500 euros avait été atteinte ! Pas étonnant pour Sander Hermsen. « Ce que cette sorte de radar-tirelire arrive à faire, c’est qu’il sort la conduite de la sphère inconsciente et automatique, explique-t-il. Le comportement devient conscient, il acquiert du sens, et on peut ainsi de rendre compte de ce qu’on est en train de faire. »

Pour que la conduite devienne un acte conscient

Le plus souvent, quand on conduit, on est dans une sorte de flux automatique. Cela nous est tous déjà arrivé ! On conduit pour aller au bureau, puis soudain on y arrive et – très honnêtement – on n’a pas vraiment de souvenirs précis du trajet ! « Cela est dû à l’automaticité de ce genre de comportement, qui est à la fois habituel et impulsif, confirme Sander Hermsen. Vous suivez le flux de voitures, et quand la route vous invite à rouler plus vite, vous accélérez et avant de vous en rendre compte vous êtes en excès de vitesse. En fait, vous ne saviez pas vraiment ce que vous étiez en train de faire. »

Le simple fait de remettre du sens dans une action totalement banale permettrait donc de faire accepter la limitation de vitesse. Et puis c’est bien connu, au niveau du cerveau, les mécanismes liés à la récompense sont beaucoup plus efficaces que ceux liés à la punition. Et ce, finalement, quel que soit le domaine.

Source : https://www.rtbf.be/info/article/detail_au-pays-bas-on-recompense-les-automobilistes-vertueux-felice-gasperoni?id=10007249